Développement éolien à Stanstead-Derby Line, certainement pas comme ça
9 mai 2012 - Depuis quelques jours, un projet de parc éolien situé au sud de la frontière canado-américaine inquiète la population de la région de Stanstead en Estrie, et avec raison. Le promoteur américain responsable du projet semble oublier qu’au-delà du poste de douane il existe une communauté qui aurait dû être informée et consultée.
L’une des craintes exprimées par la population est que la distance entre une des éoliennes américaines et certaines résidences québécoises n’est que d’environ 250 mètres. Ceci ne respecte ni les bonnes pratiques de l’industrie québécoise, ni les normes en la matière applicables chez nous. Au Québec, la distance devant être respectée entre les éoliennes et les résidences est d’au moins 500 mètres, soit près du double. La norme exige que les éoliennes soient situées à une distance suffisante pour assurer que le niveau sonore, des éoliennes au mur extérieur des résidences les plus rapprochées, ne dépasse pas 45 décibels le jour et 40 décibels la nuit. Des études d’environnement sonore sont exigées pour assurer le respect de cette norme. Ces exigences font maintenant consensus chez les communautés accueillant des projets, les promoteurs, les experts et les autorités publiques.
Dans les documents déposés devant la Vermont Public Board, le promoteur du projet Smugglers Hill Farm, situé à Derby Line au Vermont, détaille avec minutie la portion américaine du milieu dans lequel il souhaite réaliser son parc. Au nord de la frontière? Néant. Le projet n’est donc pas acceptable dans l’état actuel des choses, car il s’est développé sans consultation d’une part importante de la population avoisinante. C’est pourquoi l’AQPER demande au gouvernement du Québec d’intervenir auprès des autorités américaines et vermontoises afin de faire connaître son opposition à ce projet dans sa présente forme. La rencontre prochaine du Northeast International Committee on Energy (NICE), préparant la rencontre des gouverneurs de la Nouvelle-Angleterre et des premiers ministres de l’Est du Canada, est la tribune toute désignée pour ce faire. Il s’agit également du forum idéal pour aborder la problématique des consultations publiques pour des projets énergétiques ayant des impacts limitrophes transfrontaliers.
L’acceptabilité sociale est une condition sine qua non de tout projet, voire du développement et de la pérennité de toute industrie, filière éolienne inclue. Les producteurs de nouvelles formes d’énergie doivent être à l’écoute des communautés d’accueil. Ils ont la responsabilité de rechercher leur appui ainsi que celui des communautés avoisinantes. Cette responsabilité ne peut être reléguée en second lieu. Au Québec, la grande majorité des promoteurs éoliens ont réussi cette démarche. Les projets y voient le jour dans le respect des communautés d’accueil tout en contribuant à la diversification des approvisionnements énergétiques.
Le promoteur du projet Smugglers Hill Farm doit donc restaurer un lien de confiance avec l’ensemble de la communauté d’accueil, ce qui inclut les citoyens vivant à proximité du projet des deux côtés de la frontière. Force est de constater qu’il devra retourner à la planche à dessin pour revoir son projet et renouveler la consultation puisqu’il doit obtenir l’acceptabilité sociale. Certes, l’analyse du projet est complexifiée par un enjeu de juridiction internationale, mais une réalité fondamentale demeure : la frontière n’arrêtera ni le vent, ni les préoccupations des voisins du projet. Une solution politique doit donc être convenue entre les gouvernements afin de poursuivre le développement durable des énergies renouvelables.
Jean-François Samray, Président-directeur général
Association québécoise de la production d’énergie renouvelable